Compagnie n°8 – GREEK

La compagnie n°8 crée des spectacles qu’elle joue dans la rue, comme Monstres d’humanité ou Homos Sapiens Bureaucraticus où est mise en scène la déshumanisation de traders devenus des zombies s’entre-dévorant dans un bain de sang et de billets qui volent… Ici, sous un chapiteau sis dans un parc de Bagnolet pour le festival de clowns du Samovar, où s’entassent plus d’enfants que d’adultes, la Cie présente une création sur la crise grecque. L’inénarrable Alexandre Pavlata, vu dans Franky Allright et dans un cabaret burlesque où il incarnait le même rôle de crooner exhibo, débarque en titubant sur la piste, bientôt rejoint par son compère Christian Tétard. Voilà deux mâles grecs sortis d’un cliché, épris de boissons et de désenchantement, qui s’interpellent avec flegme, fainéantise ou emportement, jetant quelques mots de mépris à ces spectateurs-touristes.

Ces clowns tristes éprouvent les plus grandes difficultés à s’asseoir sur des chaises bancales disposées de part et d’autre d’une table bancale. Il ne se passe pas grand’chose puis, progressivement, ça monte puissance. Quelques mots sont prononcés en grec, baragouinés, toujours les mêmes, parakalo (s’il vous plat) le plus souvent, puis les corps oscillent et chutent, avant de se livrer à des cascades spectaculaires. Sans jeu de clown appuyé, les comédiens incarnent physiquement l’idée d’un déséquilibre humain, leurs voix sont rauques et leurs visages s’animent de mimiques désenchantées qui en disent si long… Lorsqu’enfin ils sortent le ouzo, la piste est prise dans un tourbillon de verres renversés et d’assiettes qui volent.

Ça vrille, ça tombe et ça hurle d’une manière à la fin peut-être systématique, mais on aime la spontanéité de ces cris, de ces larmes. Les comédiens parviennent à tout suggérer avec peu de mots et quelques expressions, sans jamais nous apitoyer. C’est la déconfiture progressive d’un pays au bord du chaos qui se dessine dans ces corps contorsionnés, alcoolisés, toujours avec le rire. Un rire intelligent et humain que font naître, en dispensant généreusement leur l’énergie brute, ces deux enseignants à l’école du Samovar.

Leave a Reply

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

*

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.