Yohann Métay – La tragédie du dossard 512

Le spectacle de Yohann Métay, c’est un peu l’exception qui confirme la règle au milieu des performances décalées du festival Humour et eau salée. Voici un one-man-show pur et dur, un standard efficace, avec ses qualités et ses défauts. Un truc bien rodé qui tient la route en racontant une histoire. Celle d’un ch’ti gars du Nord (alors que Métay est des rares humoristes des Deux-Sèvres) qui se retrouve avec ses potes au bar du coin. Oui, mais la Leffe Triple monte vite à la tête, et c’est justement sur un coup de tête que ses potes et lui se lancent un défi qu’il sera seul à relever : faire le tour du Mont-Blanc en courant. C’est parti pour six mois de préparation à l’Ultra Trail du Mont Blanc (UTMB), deux jours de course intensive qu’il prend au sérieux en suivant scrupuleusement un régime et les indications des magazines spécialisés. Entre autres symboles réservés aux initiés, il évoque la polaire finisher que seuls ceux qui ont terminé la course peuvent arborer, tout en découvrant à la fin qu’on peut l’acheter chez Décathlon.

Pendant 1h45, durée rare pour un one-man-show, le comédien conte cette épopée en détails, sur un mode narratif extrêmement illustré. Après avoir fait partie de l’équipe de France d’improvisation, enseigné dans diverses ligues, le formateur devenu pro du one-man construit son spectacle avec le sens de la formule – par exemple « dis-moi ce que tu fais, je te dirai comment tu cours », lui qui court en canard. Dans cette course où l’effort révèle la personnalité des gens, il côtoie un touriste en tongs et une intransigeante responsable des RH qui va finir par flancher. C’est un supplice qu’il nous fait partager, avec la lassitude qu’entraîne la monotonie du paysage où l’on ne voit que des sapins. Selon un procédé comique en vogue, il personnifie ses organes, notamment le foie vu comme prisonnier martyrisé dans une cave, tout comme les sept péchés capitaux : la santé et le masochisme qui s’affrontent toujours, ou l’orgueil à la voix de Sarkozy.

Après six mois d’abstinence, l’aigle de Tourcoing pourra affronter la douleur musculaire et psychologique, les TUC tout secs qu’il ne peut avaler quand il court, ou le mirage, après 70 km de course, d’une plâtrée de nouilles, et 200 lits de camp où chacun enlève ses chaussettes en même temps. Mais il reste encore 80 km à parcourir. La folie le guette avec la faim, les phrases qui tournent en tête comme des litanies de mantras, la succession des arbres, le foie qui se tord. A la fin, le public lui offre une standing ovation à la mesure de sa performance !

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