Qu’est qu’on fait pour Noël ?

On connaît Vincent Roca et aussi Jacques Dau, qui participaient à l’émission de Stéphane Bern sur France Inter il y a dix ans, l’un tout seul et l’autre dans le duo Dau et Catella – qu’on a pu voir convaincants en Sacco et Vanzetti. Tous deux partagent le goût du jeu de mots. Si Dau est un acteur incarné, dont la présence sur le plateau dégage une aura singulière, Roca semble plutôt un orateur. Dans cette création composée par Roca à partir d’anciens textes, comme d’ailleurs son précédent spectacle vu dans la même salle, on sent sa patte, sa plume particulière, avec ce flot verbal typique qui procède par enchaînements phonétiques. L’exercice de style est ici interprété à deux, ce qui fait à la fois la faiblesse et la force du spectacle, les dialogues ayant un caractère un peu artificiel, sans vrai fil conducteur…

Deux concierges d’un palace imaginaire devisent tranquillement dans un décor en carton pâte, enchaînent les brèves de réception et se posent périodiquement cette question du titre : « qu’est-ce qu’on fait pour Noël ? » Ah ah, vous êtes tombés dans le panneau de l’équivoque, Noël est un de leurs amis défunt dont ils doivent organiser les obsèques. On retrouve la langue de Roca, avec son art de filer l’harmonie imitative qui fait de chaque phrase une myriade d’échos sonores, une suite de résonances ornées de calembours qui s’annoncent parfois à gros sabots… Et cette litanie a beau être périlleuse, elle crée un rythme répétitif où manquent cassures et changements de ton.

Jacques Bonnafé, qui a donné un coup de main à Roca pour fignoler ce spectacle, dit que « les textes s’imbriquent et se parlent bien ». De fait, on sent que c’est un composite de morceaux épars dont on cherche parfois la cohérence. Cette succession de thèmes est traitée à la manière d’un ping-pong verbal, où sont évoqués l’inégalité à la naissance, les mérites comparés du feu et de la flamme symbolisant l’homme et la femme, la gauche et la droite et, à la fin, un passage sur le temps qui rappelle Vite, rien ne presse !

La présence de Jacques Dau donne consistance à ce duo. Le jeu entre les comédiens est très complice, surtout lorsqu’ils se lancent dans des assauts de politesse, en recourant à des mots usuels bien sentis. Heureusement que Dau pousse quelques coups de gueule pour nous décoller du siège, car on perd parfois le fil dans cet exercice de jonglerie un brin systématique.

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